samedi 27 août 2011

Raphaël Toriel : quand Palmyre n’est pas loin des Savoie(s)

Raphael Toriel - Dans les jardins
de La Revue Phénicienne.
 








On note dans les différentes œuvres de Raphaël Toriel, l’auteur de théâtre franco-libanais qui n’est plus à présenter – ses pièces ayant été mises en scène de nombreuses fois -, deux faits : d’abord, il raconte l’histoire avec un « H » avec originalité, comme si l’on rentrait chez soi et, du coup, l’Histoire devient alors une grande amie ; ensuite, il met en scène des figures féminines qui ont eu l’heur d’exister de façon grandiose telle la reine Zénobie ou, à un degré plus modeste, comme l’actrice de cinéma Marylin Monroe.
Raphaël Toriel redonne vie au passé et fait resurgir des personnages qu’il nous rend attachants, qu’ils soient très éloignés de nous à l’image de Boabdil, roi de Grenade (« Comme une femme ... ») ou, plus proches, comme Khalil Gibran et Albert Einstein (« Le génie, le prophète... et la femme ») ou encore, sous les traits tourmentés de Max Ernst, le peintre des années quarante (« La fiancée du vent »).
Il apporte un éclairage intimiste à des caractères que l’Histoire a enfermés dans un reformatage qui ne souffre aucune fantaisie à force de manipulations d’investigation historique, d’hypothèses vérifiées, leur donnant pour l’éternité une place et une image dont ils seraient peut-être les premiers surpris.
Sous sa plume, le lecteur a plaisir à les rencontrer, à les côtoyer : ils font partie des siens ; ainsi, par exemple, l’on est extraordinairement fasciné par Zénobie dont on suivra les traces depuis la petite enfance ; le fil par lequel nous tient Raphaël Toriel nous mène dans le périple de la grandeur et la décadence de l’une des plus grandes souveraines du Temps planétaire, nous la faisant aimer parce qu’ayant pénétré ses plus secrètes pensées et l’émotion est fortement au rendez-vous, dans les voyages entre Palmyre, Byblos et des haltes en des lieux où grandira et vivra Zénobie qui devient, ainsi, notre regard sur un univers disparu  ... « J’ai le cœur à Palmyre » est l’une des œuvres que nous avons le plus appréciée car elle soulève un pan de l’histoire de la reine Zénobie d’une manière anticonformiste où la reine « se » raconte plus qu’elle n’est racontée ...
Par quel fait extraordinaire, Raphaël Toriel arrive-t-il à donner à toutes ces figures connues de l’Humanité, ce désir de mieux les connaître parce qu’il nous les aura fait aimer ?
C’est la question qu’Arabian People & Maghrebian World a tenu à poser à l’auteur.

Avec l'aimable prêt
de l'auteur (reproduction
interdite).




Arabian People & Maghrebian World : Vous montrez vos personnages historique toujours sous des traits attachantss ; s’agit-il d’« humaniser » en quelque sorte ceux/celles que l’Histoire a sacralisés, ou bien est-ce sous cet angle-là que vous préférez les aborder ?
Raphaël Toriel : Que j’admire ou que je déteste  un  personnage, je le vois d’abord fait de chair et de sang. La statue a naturellement attiré mon attention, c’est elle qui l’a fait rentrer dans mon univers, mais ce sont failles qui me séduisent. Je ne cherche pas à « humaniser ». Ils sont avant tout humains, c’est cette part qui m’interpelle et que je tente de restituer.

Arabian People & Maghrebian World : Votre livre « J’ai le cœur à Palmyre » associe le roman au théâtre. Comme si vous vouliez sortir du sentier qui vous est habituel – le théâtre. Cependant, vous revenez, par moments, vers ce dernier. Est-ce volontaire ou avez-vous ce projet de faire coexister roman et théâtre ?
Raphaël Toriel : Certains autres auteurs écrivent d’abord un roman et l’adaptent pour la scène. Je ne crois pas la démarche suffisamment qualitative. Je fais donc les choses à l’envers. « J’ai le cœur à Palmyre » a d’abord été une pièce de théâtre. C’est court, une pièce, bien trop court pour satisfaire toute la curiosité que j’avais de cette femme sublime. Quand on écrit pour le théâtre, il faut trouver le nœud dramatique. Celui-ci doit être fort, dense et représenter une tranche de vie. Et puis, le théâtre, n’est pas le cinéma. Peu de gens y ont accès et encore moins le lisent. J’ai voulu continuer à chevaucher un peu à ses côtés et en faire profiter un plus vaste public. j ai donc écrit un roman, mais je suis homme de dialogues, c’est ce qui a mon avis, peut donner parfois au lecteur l’impression de ce retrouver sur scène. C’est largement voulu !
Actuellement, j’écris un autre roman, à la suite d’une pièce.

Arabian People & Maghrebian World : Vous posez un regard attendri vers les femmes que l’Histoire a connues ... soit saisir le côté positif de leur caractère ...
Raphaël Toriel : J’aime les femmes et leurs complexités. Mes personnages féminins peuvent être célèbres ou pas, peu importe. Pourvu qu’ils aient un contenu qui m’émeuvent. Dans « L’attente », par exemple, je me suis inspiré de cousines et d’amies rencontrées au Liban il y a quelques années. Il s’agit de trois sœurs qui attendent le fiancé de l’une d’entre elles qui va faire sa demande. Arrive un bouquet qui va mettre en émoi toute la maisonnée, y compris la mère. S’en suit des échanges aires doux, profonds et drôles. C’est une phrase de Jules Romain qui m’en a donné l’idée : « Dans la maison du bonheur, la pièce principale est la salle d’attente ». Elle a été magnifiquement montée en France et j’espère pouvoir bientôt la présenter au Liban. 

Arabian People & Maghrebian World : Nous avons l’habitude de terminer nos interviews toujours par la même question : si vous deviez vous définir, quel serait le mot qui vous correspondrait le mieux à votre sens ?
Raphaël Toriel : C’est un exercice difficile et périlleux. Disons que ce que j’essaye d’être, c’est « humain ». 

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