lundi 9 décembre 2013

Le mot de la Rédaction : 2013 n'est pas notre année


Cette année n'aura pas été dans le karma d'Arabian People,
Maghrebian World.
Pourtant, la "culture" est là. Encore faut-il savoir ce qu'on entend par culture.
Alors ? Défaitisme ? Peut-être. Désintérêt ? Surtout pas. Cependant, la Rédaction regarde les événements se dérouler à une vitesse effrayante et, malgré une réelle passion pour le monde culturel, elle se croise les doigts.
Dans les arcanes culturelles, il est des évidences qui bousculent son image d'Epinal car il y avait jusque-là, une certaine espérance : la culture était celle qui pouvait encore nous mettre la tête hors de l'eau.
Arabian People, Maghrebian World avait été créé dans cette vision d'un monde à protéger via la littérature et les créations artistiques. L'on avait - tiens, nous parlons déjà au passé !- encore l'envie de promouvoir ce qui se faisait dans le Maghreb, dans le Proche-Orient arabe et puis, finalement, dans le monde tout court.

Une année 2013 qui n'a suscité ni l'intérêt des lecteurs (17 abonnés et  plus de 27 000 visiteurs à peine au bout de plus de trois ans d'existence), ni celles des maisons d'édition ou d'écrivains et artistes - zéro abonné, avec une petite mention de temps à autre qui fait, d'ailleurs, partie du passé parce qu'il est peut-être plus gratifiant de citer les articles de journaux que ceux d'un modeste blog dont on ne peut dire qu'il manque de conviction. Par gratitude, n'oublions pas les personnes qui le suivent sur Twitter. Quant à Facebook, bah...

Peut-être est-ce dû à la politique rédactionnelle... Va savoir ! Mais l'on n'est pas fermé à toute suggestion, pour peu qu'elle aille dans le sens du blog-magazine.

La Rédaction se donne encore une année afin de voir où va Arabian People, Maghrebian World.
Après ? Nous verrons.
F. C-A.

vendredi 6 décembre 2013

Le mot de la Rédaction : Nelson Mandela, le chemin de la liberté



Et si un Nelson Mandela se cachait derrière chacun d'entre nous ? Et si son destin révélait un même destin en chacun d'entre nous ?

Que serions-nous aujourd'hui ? Quel chemin aurions-nous pris ? Celui de la liberté ou de l'aphasie dans laquelle nos vies plongent en ces instants, n'engendrant qu'actions sans destinée profonde, sans culture, sans libération de l'esprit, de la pensée et du corps? De soi.

Nelson Rolihlahla Mandela n'est pas seulement un héros et un héraut. Il est ce que nous devrions tous être. Mais la montagne est difficile d'accès car, il l'a dit, le courage n'est pas de ne pas avoir peur, il est de vaincre sa peur.
Nous avons peur de ce que nous sommes : muets. Nous avons peur de ce que les autres voient en nous : notre silence qui pourrait devenir parole vivante, qui pourrait devenir écrit pérenne.

Sa modeste personne nous dirait, en ces moments de sa disparition : j'ai fait ce qui devait être fait. Nelson Rolihlahla Mandela a fait ce qui devait être fait.
Merci, Madiba.
F. C-A.

Un long chemin vers la liberté (Le Livre de Poche)
"En plus de la vie, d'une forte constitution, et d'un lien immuable à la famille royale des Thembus, la seule chose que m'a donnée mon père à la naissance a été un nom, Rolihlahla. En xhosa, Rolihlahla signifie littéralement "tirer la branche d'un arbre", mais dans la langue courante, sa signification plus précise est "celui qui crée des problèmes". Je ne crois pas que les noms déterminent la destinée ni que mon père ait deviné mon avenir d'une façon ou d'une autre, mais plus tard, des amis et des parents attribueront en plaisantant à mon nom de naissance les nombreuses tempêtes que j'ai déclenchées et endurées. On ne m'a donné mon prénom anglais ou chrétien plus connu qu'au premier jour d'école,..."

vendredi 29 novembre 2013

Fondation Zinsou : un musée africain



"Hommes debout" de Bruce Clarke
(Photo Fondation Zinsou.
Rep. Interdite)
Quand la culture devient la route de la déliquescence, ou de l’utilitaire, ou du mercantilisme mais surtout, et surtout, jetée dans les annales du Vide … « Hommes debout », du plasticien Bruce Clarke, détruite en janvier 2013 sur ordre ministériel. Cette oeuvre était une initiative de la Fondation Zinsou, musée à Cotonou.
Tout ne part que d’un rien ne tenant compte ni de l’esprit créatif, ni du droit aux hommes d’exister autrement que par le boire et le manger… et que tout est simplement affaire de sentiments subjectifs ou volonté de fermer la porte au droit à la culture.
Un musée africain, au coeur de Cotonou, est l'un de ces hommes debout qui dit le désir de tout être vivant d'avoir droit à la culture et que tout n'est pas déliquescence.
Le Bénin, l’Afrique depuis le nord jusqu’au sud, continuent d’écrire leur Histoire. Au-delà de toute existence éphémère, au-delà de tous les appétits.

A la rencontre d'un musée africain entré dans la défense de la culture :

mercredi 30 octobre 2013

Beyrouth à l'heure du Salon du livre francophone


Beyrouth... qui a dit que l'instant n'est pas à la lecture ? Quand des vents contraires soufflent sur tes regards et plongent ta chevelure d'algues dans une mer qui ne connaît que des remous obscurs ?
Semble dépérir et mourir la pensée, plus près est-elle cette rive, déchirée mille fois, trahie mille fois, comme le Phénix (re)naissant de ses cendres. 

Rien n'arrête la fontaine des mots car ils sont, pour elle, l'offrande nécessaire à son jaillissement impétueux, seule fenêtre possible pour l'envol quand tout la retient d'entre les griffes de ces orages malsains qui la secouent en chaque heure.

Quand tout paraît amenuisé jusqu'à devenir peau de chagrin, les "tisserands" du livre gravent leurs soubresauts à la pointe de leurs rêves comme pour braver les esprits acharnés à détruire...

Salon du livre francophone de Beyrouth
Du 1er au 10 novembre 2013

lundi 30 septembre 2013

Automne parisien : danser avec Mamela Nyamza et Latifa Laâbissi


Pour cette saison 2013 du Festival d'automne de Paris, la danse et encore la danse, au rythme de l’Afrique du Sud, avec Mamela Nyamza et, aussi, avec Latifa Laâbissi.

La première nous est une lumière de l'Afrique du Sud, elle est tout en grâce suave, elle est histoire, elle entraîne avec elle les Kids de Soweto's Finest dans cette histoire si douloureuse, de cette terre attachante où résonne encore la voix de l'empereur Chaka. Elle ouvre la fenêtre sur la danse urbaine et nous dit l'histoire de son pays, au rythme d'histoires de rebelles, de la figure de Nelson Mandela et de tous les courages. 

La seconde est une touche à tout : conception, interprétation, costumes. Elle est esthétique mais aussi langage des époques, des genres, des histoires. Elle est tout en un.  Son spectacle Adieu et merci est un phénomène de contorsions anachroniques sur une scène blanche où les projecteurs la suivent comme une ombre.
Chorégraphe complexe, elle est dans la singularité la plus totale comme on l’a vu avec son spectacle I love like animals (2002). Elle est dans le réalisme jusqu’au bout à tel point que l’on se demande où commence l’art, où explose l’originalité...

Mamela Nyamza 
Jusqu’au 16 octobre 2013
Musée du quai Branly
Latifa Laâbissi
Centre Georges Pompidou
20 au 22 novembre 2013

jeudi 29 août 2013

Le Mot de la Rédaction : de l'engagement

Que sont les mots ? Que sont-ils pour un écrivain, un poète ? Sont-ils pur esprit ou invitent-ils à l'engagement ? L'engagement dans la connaissance, l'engagement dans le politique et l'engagement dans l'histoire.
Sartre invite à la réflexion dans son livre Les mots, lui qui fut dans l'engagement de bout en bout de l'intellectuel. Suivi en cela par un Henri Barbusse, un Romain Rolland et plus près de notre partie géographique, un Kateb Yacine.
Chez nous, l'écrivain ne saurait se libérer de ce carcan. Comme s'il n'avait d'autre choix. Sinon celui du désengagement vis-à-vis de la culture qui l'a produit, le politique qui l'a fait s'élever ou s'enfuir vers des cieux où l'écriture n'a de véracité que celle d'exister.
Aujourd'hui et souvent parce que l'écrivain se conjugue en prix littéraires, en droits d'auteur, en célébrité, son engagement en tant qu'auteur du Monde arabe et du Maghreb n'a d'existence que parce que la situation présente en ces régions l'exige alors qu'il se veut simplement auteur.
Cependant, il sacrifie à la mode : l'engagement n'est pas une foi, il est social. Sans plus.
A méditer. 
F. C.-A.

jeudi 25 juillet 2013

Sète... si Vive


Sète se meut au fil du mot mais l'été ne rêve pas d'un cil et nous voici à gamberger, à rechercher le tissage des dires et des visuels pour emplir l'espace ici, dans toute la couleur anthracite d'Arabian People, Maghrebian World...
Sète enlace les entrelacs d'écritures, un brouhaha émotionnel mais insuffisant car le poète a peu de temps pour se lire, pour s'entendre et être entendu : ces Voix Vives plongeant leurs racines dans l'eau méditerranéenne.
Rêvons ou faisons semblant de le faire car il n'est pas dit que le poème entend le rêve comme on le souhaiterait. Peut-être parce qu'il est utopie ou viscéralement centré sur son auteur ? Qu'en savons-nous ?
Une simple digression. Pour oublier cet été qui ne rêve pas d'un cil.
F. C-A.

Voix Vives
Festival de poésie à Sète
Du 19 au 27 juillet 2013

lundi 24 juin 2013

Festival de Jerash : des changements dans la qualité




Les organisateurs de l'édition 2013 du grand Festival de Jerash (Jordanie), se proposent de présenter une meilleure vitrine de la culture du Proche-Orient arabe : le qualitatif des représentations et la réflexion autour de l'édition pour faire en sorte qu'il y ait un "pont de communication".
Le festival intègre aussi dans sa programmation la célébration du 50ème anniversaire de l'indépendance de l'Algérie
Dans la programmation, on note la présence de la Ferqat Al-'Achiqine Felistine et de l'ensemble marocain Ibn 'Arabi de musique andalouse.
Le centre culturel royal accueillera également un certain nombre de poètes.

mardi 4 juin 2013

Nadia Sebkhi pour qui Césarée pleure le plus souvent

Nadia Sebkhi, poétesse algérienne, nous offre une dimension surprenante avec son roman Les sanglots de Césarée. Le mystique et le sensualisme se côtoient, appuyés par le poème - que l'auteure n'oublie jamais - mais brutalisés par le réel que vit la société algérienne, perdue dans le labyrinthe de ses tourments, la trivialité de ses désirs.
Les sanglots de Césarée vous désarçonnent car, à chaque instant, surgissent les monologues des personnages de Lyna, Hadi et Rasha agitant votre perception de la réflexion dite ici, sans retenue aucune, sans censure. Est-ce un journal intimiste, un roman, un poème que ce livre qui dévoile une part profonde des pensées de Nadia Sebkhi ? On est tenté de l'affirmer mais on n'ose même si, par ailleurs, la poésie de Nadia Sebkhi nous le confirme. 

L'émotionnel est à fleur de mots, à fleur de peau, myriades de chemins qui transcendent la problématique mystique du roman. Le lecteur va de l'un à l'autre. Avec les mots de Rasha : "Sa seule confidence était sa feuille blanche. Elle écrirait son ardeur impossible. Sa renaissance. Ce désordre dans sa vie", avec ces paroles du Mahatma Gandhi : "Puisque notre sort, ici-bas, est de souffrir puis de mourir / Ne devons-nous pas souhaiter de rendre le plus tôt possible à la terre notre corps misérable ?"

Quel questionnement ! La renaissance de soi et la fin du soi physique. Dans le même réceptacle de pensées : le désordre/chaos; la souffrance/mourrance. Rasha souhaite la renaissance, Gandhi voit l'infinitésimal au-delà de la terre qui retient, éphémère demeure de la vie mais éternelle demeure de "notre corps misérable"...


Nadia Sebkhi, poétesse et romancière, a publié un recueil de proses, Un amour silencieux, et un recueil de poésie, Sous le voile de mon âme. En 2008, elle a fondé, à Alger, le magazine littéraire L'ivrEscQ.


Les sanglots de Césarée
Aux éditions L. de Minuit
Site : http://www.livrescq.com


mardi 14 mai 2013

Le Mot de la Rédaction : Pause



Arabian People, Maghrebian World fait une pause et reviendra bientôt !

La Rédaction laisse ouvertes ses portes aux talents et aux idées qui pourraient apporter un second souffle ! N'hésitez pas à lui en faire part via les commentaires ouverts exceptionnellement durant cette seconde quinzaine de mai !

F. C-A.



vendredi 10 mai 2013

Hassan Wahbi : s'absenter de soi-même


Hassan Wahbi.
Ph. Al-Manar.
Reprod. interdite
.
Comment dire le poème, lorsque le poète suffit à sa propre émotion et qu’il n’est point besoin d’autres émotions pour le parler, pour le chanter et pour l’expliquer ? Comment dire les mots ? Posés, là, gouttes d’inspiration transcendante que le sens philosophique a effleuré de son aile et lui a donné cette manière d’exister et que l’on ne saurait décrypter, les mots arrivent lentement au fil des pages, pierres d’un chemin que le poète Hassan Wahbi dénude jusqu’à se dénuder lui-même et oser révéler :
« S’absenter de soi-même
se reposer de sa propre maison
de sa propre peau, un peu,
quitter sa parole...
mais pour aller où ? »

Qu’écrire après un dépouillement de soi pour se vêtir du seul poème qui serait, en quelque sorte, le reflet scriptural de la parole poétique ? L’ Eloge de l’imperfection devient  alors un itinéraire non pas de lecture mais celui du questionnement de soi conduisant à « emprunter / plusieurs chemins / dans un seul ».

Dialogue du poète avec lui-même : un exercice habituel chez les poètes mais pas de cette manière-là, pas avec cet épurement qui vous laisse seul face à vous-même comme si vous étiez seul à parler au texte, à mesure de lecture. Peu de poètes arrivent à ce minimalisme pour penser ainsi et ce ne sont plus des gouttes d’inspiration transcendante mais des gouttes de soi, lancées sur les pages parcheminées d’un livre qu’on referme non pas pour l’oublier mais pour le rouvrir dans l’heure ou dans les heures qui s’ensuivront...

On ne saurait aller plus loin, parce que le faire, c’est empêcher le poème d’être ce néant métaphysique si plein de trop de tout, si plein de ces jours qui déroulent leur(s) vie(s) comme autant d’imperfections parties à la recherche de ces pays « inassouvis », dans leur inachèvement tant « l’abîme est là / au sein du souffle ».

Et parce que l’inassouvissement ne peut combler le « bruit des paroles », le poète aimerait « être l’étranger / de toute vie, / de toute supplique »...


Eloge de l’imperfection, Hassan Wahbi

Editions Al-Manar
96, bd. Maurice Barrès
92200 Neuilly-sur-Seine
Tél. : +33 9 53 09 50 74

dimanche 28 avril 2013

Journée mondiale du Jazz : concert de Goya à Alger



A l’occasion de la Journée mondiale du jazz, le groupe Goya donne un concert exceptionnel, ce mardi 30 avril 2013, à Alger.

Un jazz "home" qui entremêle des sonorités jazzy à cette forme d'expression spécifique de la musique contemporaine algérienne puisant son écriture dans les fondements musicaux du Maghreb et cela se traduit par la composante même du groupe dont les membres sont issus des diverses métropoles algériennes, Oran, Constantine, Béjaïa, Alger.

Intéressante formation qui est assurément de la grande lignée des groupes légendaires - quand bien-même seraient-ils différents - comme Nass el-Ghiwane et leur titre "Lillah ya chemaa" a ce quelque chose d'attachant les rapprochant du grand groupe marocain...


Le groupe Goya dont le nom n'est pas sans rappeler Francis Goya :
Rihab Alloula, chant
Oussama Becissa, luth
Fares Benlechehb, clarinette, saxophone,
Abdehali Ben Medjber, percussions (ou peut-être Abdelhak Ben Medjber)
Younes Kati, percussions
Amine Zidane, basse, guitare


Goya – 19 heures – Entrée libre
Auditorium de la radio Aïssa Messaoudi
Alger


dimanche 7 avril 2013

Zohour Al-Mandil : quand le poème devient une mouette




حين يغمرك الحزن
لا ترى إلا اللون المر
برغم كل الألوان الزاهية حولك
 
(Alors que te noie l’affliction
Et que tu ne vois que la couleur amère
Avec l’amour, toutes les couleurs revivent autour de toi)
Trad. Arabian People & Maghrebian World

Ces vers ci-dessus que nous avons retenus parce qu'ils lui correspondent à notre sens, sont de la poétesse saoudienne, Zohour Al-Mandil, qui vient de publier, aux éditions l’Harmattan, un recueil traduit en français Le silence des chemins. Rappelons que la poétesse  fut présente, en décembre 2012 à Bordeaux, à la Journée mondiale de la langue arabe organisée par le Centre culturel du patrimoine arabe et en partenariat avec l’Unesco.

Les mots de Zohour Al-Mandil se posent, pareils à des gouttes d’eau qui se déversent sur vous mais avec ce rien de nostalgique, ce rien de tristesse. Un peu comme dirait le poète français Verlaine, « il pleure dans mon cœur comme il pleut sur la ville ».

Zohour Al-Mandil nous avoue dans sa pensée la plus dépouillée,

J’ai rêvé d’une mouette
Qui m’a dénudée de moi-même

Simplicité redoutable car il ne faut guère s'y tromper, la poétesse prend l’envol pour sortir de sa carapace, jeter les grilles du jardin où elle s’est éclot avant de dire plus loin,

J’apprends tout ton alphabet
Ton silence
Ton accalmie
Ta révolte...

L’on ne sait si ce silence, cette accalmie puis cette révolte parlent de la poétesse ou de l’être invisible dont elle ne dit pas le nom mais si tout est dans la pureté, sans fard, la mouette qu’elle veut devenir, ou la fleur arrimée à la terre, sont toutes deux le visage d’un seul regard. Alors vient cette révolte qui s’oppose à cette accalmie trompeuse puisqu’elle est trop faite de silence.


Et qui dit silence, ne dit pas forcément muette parole.

Un recueil à découvrir et à lire, à l’ombre du jardin secret des âmes qui chuchotent leurs dires.


Le silence des chemins de Zohour Al-Mandil
Traduction d'Aline Akram et préface d'Imane Rouhi
Aux éditions l'Harmattan
Section Littérature/ Poésie

dimanche 31 mars 2013

"Jeunesse, Etat d'urgence", un spectacle signé Idir Benaibouche



« Jeunesse, Etat d’urgence », un one man show Idir Benaibouche qui met en scène un personnage se prenant pour un Messie et racontant le « conditionnement de l’Etat d’urgence tout en proposant un immense projet de société qui est la danse Etat d’urgence. Celle-ci permettra aux citoyens de revendiquer leurs droits d’une manière sur-contemporaine. Le sérieux est-il le dernier rempart d’un débat ? »

De quelle jeunesse  parle-t-on ? Celle qui appuie le champignon d’une voiture achetée à prix d’or ou celle qui vit une frustration permanente, entre des études quand cela est possible et une attente au balcon de la désillusion, de l’amertume. Parions que le spectacle d’Idir Benaibouche est axé sur cette dernière image, avec ce rien de sourire gavroche, de soupçon d’ironie et d'humour si particulier aux Algériens... car les Algériens sont passés maîtres dans la maîtrise d’ironiser sur soi et sur ceux qui les entraînent au fond du puits.

De cette culture dénigrée, avilie, rendue au rang d’un muet ballet de marionnettes tenus par des ficelles usées à force de rengaines répétées, les jeunes artistes saisissent le fer de lance, happent l’espace qui leur reste, le volent d’ailleurs, pour dire que le débat, le refus, l’esprit de contradiction existent, que la culture sous tous ses aspects et dans ses pores survit à la déliquescence institutionnelle.

Oui, le non-sérieux est l’avant-dernier rempart du débat. L'humour truculent est un bon remède contre l'aphasie, la léthargie.

Le texte est écrit et interprété par Idir Benaibouche, sous la direction de Nadjib Faouzi Oulebsir.

Salle El Mouggar
Samedi 6 avril 2013 à 17:00
Alger

jeudi 21 mars 2013

Clin d'oeil sur Jean-Yves Bertogal ou le poème-ouragan



La parole au vent qui la happe pour ne plus la lâcher que par un écho profond et prolongé, le regard plongé dans ces sphères mystérieuses qui sont les siennes, Jean-Yves Bertogal nous emporte dans la verve du verbe, dans la chaleur de sa voix de stentor, il clame son slam comme il clame son ardent combat pour Haïti, contre l’esclavage et ses relents xénophobes d’aujourd’hui, il ajoute sa signature à des mots qui jouent et se jouent avec/sur la rime du cœur et de l’emportement passionnel.

Il est un homme clair dans ses idées, il avance de son pas rapide et un peu lourd d’homme citadin, berger, baroudeur et pourfendeur des eaux sombres de la haine, de l’incompréhension.
Bête de scène, dans toute sa puissance vocale et un port de tête de lion, il dit le poème/slam pour gifler les ensommeillés, pour réveiller les léthargiques. On en est presque à dire "combien est-il beau, ce fils du monde dans cette passion toujours en éveil !"

Jean-Yves Bertogal vient de publier son premier recueil L’écho des conques ultramarines aux éditions Xérographes et sera présent au 33e salon du livre de Paris.

Dédicaces et lectures
Samedi 23 mars 2013
. 14h30 à 15h30, dédicaces au stand Outre-Mer.
Dimanche 24 mars 2013
. 10h - France ô Radio, émission  avec la poétesse Suzanne Dracius qui sera également au Salon du Livre de Paris.
. 15h à 16h30, dédicaces au stand Outre-Mer.
. 16h15 à 17h30, table-ronde au stand Congo, animée par Dominique Loubao, la présidente du Salon La Plume Noire.

Les Xérographes éditions
Pascale Desmazières
19, rue Cavé
75018 Paris
Tél. : 01 42 39 59 30 
Mobile : 06 82 41 77 81
Fax : 09 55 71 73 09
Site : http://xerographes.free.fr

mardi 19 mars 2013

Au Tarmac de Paris : Grand prix littéraire des Régions francophones


A l’occasion de la Journée mondiale de la francophonie et en collaboration avec l'Association internationale des régions francophones (AIRF) et le Conseil Régional d'Île-de-France, le Tarmac lance le Grand prix littéraire des Régions francophones.

Des lectures de textes majeurs de la francophonie seront faites, en partenariat avec l’association Emile&Cie (gérée par les éditions Lansman, spécialiste de publications théâtrales) : « A travers un parcours en sept étapes jalonné par des textes d’auteurs dramatiques aussi singuliers que talentueux, vous voyagerez en Chine avec Xingjian Gao (prix Nobel de littérature en 2000), au Québec avec Larry Tremblay (prix de la dramaturgie francophone de la SACD en 2012), en Guadeloupe avec Simone Schwarz-Bart, en Fédération Wallonie-Bruxelles avec Jean Louvet, au Congo avec Sony Labou Tansi, en Algérie avec Kateb Yacine, avant un retour à Paris avec Matéi Visniec (d'origine roumaine).»

Les extraits seront lus par les comédiens Marc Beaudin, Thierry Blanc, Marcel Mankita, Caroline Piette et Sonia Ristic, sous la direction d'Emile Lansman (éditeur et conseiller au Tarmac). 
Ces lectures seront suivies du lancement officiel du Grand prix littéraire des Régions francophones.

L’intérêt du Prix littéraire des régions francophones est qu’il est destiné à tous les auteurs issus des pays francophones sous réserve qu’ils n’aient pas encore été publiés et ne soient pas sous contrat avec un éditeur. Il distinguera un roman ou un recueil de nouvelles d’environ 80 pages.

Entrée libre sur réservations au 01 43 64 80 80

Mercredi 20 mars 2013 à 18h30


Le Tarmac
La scène internationale francophone
159, avenue Gambetta
75020 Paris
M° Saint-Fargeau
Blog d’Emile&Cie : http://emileetcie.blogspot.fr/
Site de éditions Lansman : http://www.lansman.org/editions/index.php

Pour le prix, contact : 
Christine TAVANO
Directrice de l’AIRF 
AIRF
Les Bureaux Verts 
28, rue Benoît Bennier 
69260 Charbonnières-les-Bains (France)
Tél : 00 33 472 59 46 50 
Mail : airf@regions-francophones.com
Site :
www.regions-francophones.com

mercredi 6 mars 2013

Taos Amrouche, la perdrix des At Wertiran



Evoquer Taos Amrouche non pas parce qu’elle était la sœur du poète francophone algérien, Jean el-Mouhoub Amrouche, c’est évoquer la romancière, la poétesse et l’interprète talentueuse, somptueuse, faite de cette terre du Maghreb, pétrie dans la magie du terroir kabyle comme une étoile qui s’est éclipsée un jour d’avril 1976, à l’âge de 63 ans (France). Elle fut bouleversante, elle fut modeste, elle fut une culture s’embrasant dans plusieurs voix par le chant du sacre, par celui de l’exil, par celui d’une école dont on a, aujourd’hui, la nostalgie. Au centenaire de sa naissance, le 4 mars dernier, où était le souffle de Taos Amrouche ? Perché sur un amandier, adossée au mont Djurdjura, sous la brise tunisienne où elle grandit avec son frère et y vécut durant quarante années ?

« Elle a souri.
Comme un roseau sa taille a ployé. »
(Taos Amrouche)

Du côté officiel, le silence sera le même qu’il le fut pour Jean Amrouche. Mais beaucoup sont présents, saluant sa mémoire et des journaux algériens iront de leurs écrits.

Langue amzighe, langue française, elle oscillait, voguait comme une algue emportée par le flux, Taos Amrouche écrira : « La fatalité qui me poursuit, je sais aujourd’hui qu’elle est le lot de tous les déracinés à qui on demande de faire un bond de plusieurs siècles [...] Ni Racine, ni Mozart ne m’eussent manqué. C’est la civilisation qui a fait de moi cet être hybride. »

« Femmes vénérées des At Wertiran
Vous êtes roses comme des perdrix »
(Taos Amrouche)

Elle fut deux voix unies en une : celle de l’écriture et celle du chant fusionnées avec la terre ancestrale. Voici ce qu’écrira Aimé Césaire : « Quand on cherche des témoignages de mondes disparus, on pense tout naturellement à la pierre : monuments ou statues. Mais que dire de la voix humaine ? Du cri ? Du chant ? C’est ce plus émouvant, que nous apporte Taos. Chants populaires, chants sacrés, débris de liturgie ? Je ne sais, mais je sais que nous les restitue de manière proprement bouleversante la voix âpre, somptueuse et chargée d’aromates de Taos. Chants magnifiques qui nous atteignent en plein cœur, montés du fond des âges. »

A lire
. Le grain magique. Contes, poèmes et proverbes de Kabylie, Maspéro Editions, Voix, n° 13, Paris 1966, sous la signature de Marguerite-Taos Amrouche.
. Jacinthe noire,  éditions Joëlle Losfeld, Paris 1996 (première édition 1947, Charlot, Paris).
. Grandeur de Taos Amrouche, de Denise Brahimi, éditions Chihab, Alger.

A écouter « Chant de danse »




Littérature : 5eme rencontre euro-algérienne des écrivains



L'écriture est l'imaginaire. Elle revêt plusieurs formes de l'imaginaire : narrative, contemplative, historique, biographique, poétique ou romanesque. L'écriture est évasion. Elle porte plusieurs noms de l'évasion : échappatoire de la prison, qu'elle soit spirituelle, intellectuelle ou simplement politique. L'écriture est recensement des mémoires et elle en est le refuge.

La 5eme rencontre euro-algérienne des écrivains, commencée ce 5 mars à Alger, augure ces aspects-là par la présentation d'un livre-biographie de Ruth Pleyer sur Berta Zuckerkandl, journaliste et écrivain autrichienne, qui trouva refuge en Algérie pour fuir la dictature du IIIeme Reich, de 1940 à 1944. 

La thématique de cette rencontre s'interroge sur le fait littéraire entre l'introspection de soi et les multiples manières d'être soi à travers les autres. C'est entre aller au-delà et s'échapper de l'ennui (Rafaele Nigro), c'est une délivrance (Nicolae Prelipceanu), c'est débrider l'imaginaire (Akli Tadjer), c'est l'échappée par la poésie avec des emprunts à la métaphysique (Juan Vincente Piqueras).

A l'initiative à la Délégation de l'Union européenne en Algérie, cet événement annuel deviendra, assurément, essentiel dans la vie littéraire algérienne.

Auteurs invités

Nadia Sebkhi, poétesse, romancière, directrice de la revue littéraire L'Ivrescq
Nicolae Prelipceanu, poète roumain, journaliste, prosateur et récompensé par trois prix de poésie en Roumanie
Abdelaziz Benmahdjoub, sociologue, homme du cinéma et du théâtre, romancier
Petra Hůlová, romancière tchèque
János Lackfi, poète, auteur et nouvelliste hongrois
Amin Zaoui, romancier algérien
Ruth Pleyer, biographe autrichienne
Maïssa Bey, romancière algérienne et récompensée par plusieurs prix pour ses oeuvres
Juan Vicente Piqueras, poète espagnolprix international de poésie Loewe 2012
Jaoudet Gassouma, romancier et journaliste algérien
Kaouther Adimi, romancière algérienne
Raffaele Nigro, auteur italien de pièces de théâtre, romans et nouvelles
Mohamed Magani, romancier et universitaire algérien
Abrous Outoudert, politologue, directeur de publication
Vassilis Alexakis, journaliste, romancier et cinéaste grec
Hamid Abdelkader, romancier et journaliste algérien
Christine Bechet, auteur belge
Hamid Grine, romancier algérien, récompensé par les éditeurs maghrébins pour son roman "Le café de Gide"
In Koli Jean Bofane, auteur congolais, Grand prix littéraire d’Afrique noire 
Akli Tadjer, romancier et scénariste franco-algérien, prix littéraire Georges Brassens

Délégation de l'Union européenne en Algérie
Du 5 au 6 mars 2013
Hôtel El Djazaïr - Alger

dimanche 17 février 2013

Clin d'oeil : le poète Léopold Mbemba-Congo, l'à-Dieu au poème


Léopold Mbemba-Congo est parti dans le silence des draps blancs, laissant les poètes, et le vent, et la terre, et les cris, esseulés. Il s'en est allé, ce samedi 16 février 2013, alors que la mémoire de beaucoup garde le souvenir des heures universitaires, des dires près de la mosquée, du calme de ses mains, de son pas tranquille comme si le ciel l'attendait :

"Et j'attendrai encore que revienne le vent,
qu'il se calme après qu'il aura parcouru
tous les âges de la terre."
(L. Mbemba-Congo)

Hors le tombeau, le souvenir impérissable de la longue silhouette, pareille à une colline à l'orée de nos pensées, mots séculaires frangeant les arcs ployés du ciel céleste... 

Le poète sera inhumé, le 6 mars prochain, en sa terre natale. Il demeurera pour l'éternité dans cette lumière spirituelle qu'il a tellement transcendée dans ses poèmes.
F. Chaim-Allami 

lundi 21 janvier 2013

De la musique savante (2eme & dernière partie)



Cheikh al-Manyalawî  et son orchestre.
Le souffle de l’âme

Ainsi, à l’intérieur de leurs frontières et malgré cet âge d’or qu’est la Nahda, le Monde arabe et le Maghreb se sont liquéfiés territorialement, politiquement, économiquement et culturellement et la musique deviendra un petit marché sans consistance, sauvée à petites doses par des tentatives de compositeurs mais plus d’interprètes avec le cheikh al-Manyalawî (écouter dans Les musicales d’Arabian People & Maghrebian Word, colonne gauche) ou comme Munir Bashir, Muhammad al-Qubanji, Sami Chawwa, le cheikh Larbi Bensari, Mohamed El Kourd, et plus près de nous,  Naseer Shamma, Lotfi Bouchnaq, Fawzi Sayyeb (disparu en 2010, à l’âge de 81 ans), ou bien, du côté des interprètes féminines, Munira Mahdiya, dite la Sultane, Um Kalthûm dite Kawkab ech-charq, Fadéla Dzirya, avec sa légèreté vocale de «hadria» algéroise (disparue, en 1970, à l’âge de 53 ans), qui laissera la place vide pour cette musique bien particulière et dérivée de l’andalou, et, aujourd’hui, Bahija Rahal, interprète de la musique andalouse algérienne ('oud et chant).
Sami Chawwa.

A l’extérieur de ces «frontières», pour ne citer qu’un seul, il est un grand nom, celui d’Amir Khusraw (mort en 1325), né de parents turcs en Hindoustan et très influencé par la culture hindie.

Auteur de trois volumes sur la musique, traite dans son troisième volume de la rhétorique et du style littéraire Rasa’il al-i’jâz, dont un Discours sur la différenciation dans les principes fondamentaux et la filiation de la musique (Inshi’âb ‘usul wa fuû’-i musiqi) : «La musique est une science (‘ilm), de très vaste portée et de nature extrêmement technique. Les subtilités de cette science sont trop délicates pour être maîtrisées par un individu. Ses principes ont été définis au début par les savants de Rum (philosophes grecs et byzantins). La théorie des modes rythmiques (usul ‘ilmi’) est importante : el usul s’étend sur quatre, le pardah sur douze et l’ibresham sur six ans ; ce sont les bases, tout le reste étant des modes (branches ou furu’) qui sont leurs dérivés».

Les modes cités par Amir khusraw - Ibresham, Si-pardah, Sara-pardah, Dastak, Khafif, Usul i thaqil (les rythmes), Basit, Zir-i khirad et Zir-i buzurg - étaient parfaitement connus des musiciens arabes de l'époque.

Peut-être se trouve-t-il dans les petites oasis de la musique, ceux qui voudront, ont l’espoir de vivifier cette musique savante, de la faire perdurer, de la pérenniser, de l’écrire même si elle est avant tout de transmission orale. 
Il est plus que temps de se préoccuper de son écriture que de ses enregistrements qui sont plus un apport historique et ethnologique, certes non négligeable et qu'il faut prendre en compte (Colloque Un siècle d'enregistrements, matériaux pour l'étude et la transmission http://www.upa.edu.lb/fileadmin/user_upload/Media/Images/Unites_Univeraitaires/Musique/Colloque%20Un%20si%C3%A8cle%20d'enregistrements%20-%20Programme%20d%C3%A9taill%C3%A9.pdf)

Il s’agit de mettre en place de véritables laboratoires réunissant des interprètes du Monde arabe et du Maghreb, un symposium qui redressera les dérives du congrès de 1932 et s’attellera à écrire toutes les pièces jouées et chantées jusqu’à présent : non pas celles qui seront composées à partir de 1932 mais celles antérieures à la rencontre du Caire. Ce projet exigerait non seulement de codifier définitivement les pièces de base des adwar et des qaçîdates et des nûbas mais aussi, pour chaque pièce écrite, adjoindre les différentes versions issues de l’improvisation. Chaque dawr, chaque qaçîda serait un volume qui deviendrait un livret pour tout chef d’orchestre, pour tout interprète soliste de l’instrument ou vocal. La Nûba andalouse étant définitivement fixée dans l’échelle modale et ne souffrant pas d’improvisation, n’exigerait pas, elle, autant d’efforts.

L’échelle modale est déjà fixée et fut d'ailleurs utilisée par Ibn Sinâ pour une thérapie par la musique. Le grand médecin connaissait parfaitement aussi bien les modes de base : Rahâwî, Husseini, Rast, Busalik, Ushshâq, Hidjaz, Sefâhân (Isfahan), Nawa, Buzurg, Mukhâlif, que les modes subsidiaires : Zawal, Khurasani, Sharik, Nahawand, Bakharz et Marâghah, lesquels modes sont très peu travaillés à l’heure d’aujourd’hui mais prédominants dans les parties iranienne et turque.

Colloque Un siècle d'enregistrements,
matériaux pour l'étude
et la transmission.
Université d'Antonine.
Beyrouth 2011.
Aussi s’intéresser à la collecte des pièces enregistrées avant 1932, c’est bien. Encore faut-il savoir où aller. En effet, le travail d’écriture qui attend le monde musical arabe et maghrébin est phénoménal. Car il s’agit de perpétuer la tradition de la répétition mais, également, de mettre en notes la musique savante et toutes les improvisions faites à ce jour..

Cependant et en attendant le Messie, pour ce qui est de cette première «communion», même si, aujourd'hui, l’âme s'émeut et ne vit seulement qu'avec les maîtres du dawr, de la qaçida, de la nûba dans leurs plus expressives et authentiques modulations, il est comme un souvenir de gratitude. Car la première pierre, imparfaite peut-être maintenant, a été ce qui vous fait gravir la sublime échelle et a permis cette délectation des effluves modales, oublieuse et s'oubliant, pour s'attacher à tout jamais aux sonorités soyeuses de l'Inoubliable, de ce qu’il est appelé la gamme naturelle, avec ses micro-intervalles que la musique occidentale ne connaît pas, cette sophistication musicale, confirmant en cela cette phrase chantée par Um Kalthum

- al-maghnâ’ hayati er-rûh (le chant est le souffle de l'âme)


Nous avons prononcé, certes, le terme «imparfaite». L'apprentissage de la musique savante par simple répétition, ensuite l'obligation d'apprendre le solfège dans le graphisme tel que nous le connaissons aujourd'hui, donnent confusément un aperçu de l'ampleur des dégâts que connaît la musique savante du Monde arabe et du Maghreb, composition et interprétation confondues. C'est de ne pas avoir lié l'une à l'autre : l'art de la répétition, sous la férule d'un maître, et l'étude d'une écriture qui n'aurait en rien ôté à la musique savante. L'échelle tonale existait, la faute en a été qu'il n'ait pas été inventé et fixé une écriture semblable à ce que donnaient la voix naturelle et le génie créateur des compositeurs-interprètes de l'époque. Il n'y a plus ces creusets où voltigeraient, suprême technicité, intervalles aujourd'hui étouffées par la pauvreté du demi-ton ou d’instruments de musique rendant avec peine la profondeur, la ciselure d'un trois-quarts de ton.

Et lorsque l'ennui nous étreint, à force d'entendre des bruits, des sonorités qui, peut-être, sont une touchante tentative de bien faire, on se doit de regarder les grands instituts de musique où se profilent les nouveaux maîtres d'une musique hagarde, toute en synthétiseurs et se pontifiant de générer des œuvres maîtresses de on ne sait quel univers. Alors, nous prend l’envie de dire aux jeunes compositeurs : le monde est bien mal de nos jours et notre âme a besoin de panser quelquefois ses blessures, puissiez-vous être le tabîb (médecin) ainsi que le chantait Abû-l-'Ilâ, en s'adressant, un certain soir, sur la scène de l'Opéra du Caire, au parterre des riches nobliaux de la cour du Khédive et aux officiels britanniques et français, venus assister à la première de Aïda de Verdi, opéra commandé pour la circonstance. C’était ce que l’on appelle la Nahda.


Quelques pièces

Abdelkarim Raïs
Nûba Hijaz (Algérie)

Cheikh Yusuf al-Manyalawi 
Allahu yaalam (Egypte)

Abû al-'Ilâ’ Mohammad
Afdih in hafidha (texte en langue arabe ci-dessous)  (Egypte)


أفديه إن حفظ آلهوى أضيع
ملك آلفؤاد فما عسى أن أصنع
من لم يذق ظلم ألحبيب كظلمه
حلوا فقد جهل آلمحبة وادعى
يا أيها آلوجه آلجميل تدارك آلصبر
آلجميل فقد وهي وتضعضع
هل في فؤادك رحمة لمتيم
ضمت جوانحه فؤادا موجع
هل من سبيل أن صبابتي
أو أشتكي بلواي اتوجع
إني لأ ستحي كما عودتني

بسوى رضاك إليكأن أتشفع

Um Kalthûm et ‘Abdelhay Hilmi
Araka 'Assiya ed-dam'î (Egypte)
La grande qaçîda d’Abu Firâs al-Hamadani, contemporain d'Al-Mutanabbi et cousin de Sayf Ad-Dawla (IVe siècle de Hijra), fut écrite alors qu’il était captif, en apprenant que sa cousine et sœur du roi, et avec laquelle il entretenait une liaison, lui avait été infidèle. 

Magnifique et sublime pièce, d’une richesse, surtout sur la dernière envolée de « وقالت لقد أذرى بك آلدّهر بعدنا » [Elle dit alors : Le sort t’a été contraire, après nous ! - A Dieu ne plaise, dis-je, c’est plutôt toi, et non le sort !]

La version chantée par Um Kalthum l’est sur un rythme lent, chaque mot bien prononcé et s'appuyant fortement sur la musique.

Bien avant la version chantée par Um Kalthum, la même qaçîda fut interprétée et arrangée par  ‘Abdelhay Hilmi, L'expression est plus nerveuse, martelée (comme un nachid), elle est dite avec force. Il lui manque l'émotion que l'on trouve incontestablement chez Um Kalthum (texte en langue arabe ci-dessous).





أراك عصي آلدمع شيمتك آلصبر
أما للهوى نهي عليك و لا أمر
نعم ، أنا مشتاق وعندي لوعة
  
ولكن مثلي 
   لا يذاع له سر 
إذا آلليل أضواني بسطت يد آلهوى
وأذللت دمعا من خلا ئقه 
آلكبر
تكاد تضيء آلنّار بين جوانحي
إذا هي اذكتها آلصبابة و آلفكر
معللتي  
بالوصل وآلموت دونه
إذا متّ ظمآنًا
 فلا نزل آلقطر
وقالت لقد أذرى بك آلدّهر 
بعدنا
فقلت معاذا آللّه بل أنت لا آلدّهر

Spécificité du Maghreb : la musique andalouse

Ziryâb.
Il n’est pas question, ici non plus, d’aborder en profondeur la question de la musique savante au Maghreb, la problématique soulevée étant la transcription musicale et son absence dans l’univers musical, en dehors des incursions connues ou pas.

La musique andalouse du Maghreb comprend, pour le Maroc deux formes essentielles : le Tarâb al-Ala et le Tarâb al-Gharnati. Ce dernier tarâb se retrouve aussi dans l’ouest algérien, le reste de l’Algérie pratiquant le Sana’i et le Malouf, lequel se joue en Tunisie et, partiellement semble-t-il, en Libye.
Les Nûbates ont été répertoriées mais toutes n’ont pas été retrouvées. D’après de que nous en savons, les pièces recueillies ont fait l’objet de transcriptions musicales et de nombreuses compilations, ne serait-ce qu'une première, celle des pièces marocaines présentées au Congrès du Caire.

F.C-A.

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