mardi 7 septembre 2010

Yassin Adnan, incontournable auteur de la littérature marocaine d’aujourd’hui

Par Monia Boulila

Yassin Adnan, né en 1970 à Safi (Maroc), est poète, nouvelliste et journaliste. Enseignant l’anglais à Marrakech, il est concepteur et présentateur de l’émission culturelle « Macharif » sur la première chaîne de télévision marocaine Al-Awla. Il n’est pas à confondre avec son frère et jumeau, Taha Adnan, également poète.
Il est connu pour ses diverses activités dans le monde de la culture, télévisuel, journalistique et littéraire car, membre de l'Union des écrivains du Maroc, il est l'un des fondateurs de la revue littéraire arabe Voix modernes (Marrakech, 1992) et de la publication L’algarade poétique (Marrakech, 1994). En sa qualité de journaliste, il est correspondant littéraire du journal arabe londonien El-Hayat, du magazine littéraire Dubaï Al-Thaqafiya et membre du comité de rédaction du magazine arabe Zawaya (basé au Liban).

Yassin Adnan est un auteur aux œuvres multiples dont les principales sont Cuademos numero 5, ouvrage collectif coécrit avec Eloy Tizon (édition bilingue arabe-espagnol, Editions Alfar-Ixbilia, Séville, 2009) ; Marrakech : secrets affichés coécrit avec Saad Sarhane et préfacé par Juan Goytisolo (édition bilingue arabe-français, Ed. Marsam, Rabat, 2008).

Poète fécond, il se détermine ainsi, qu’il en est conscience ou non : Si j’étais né Palestinien/ On m’identifierait à une Cause, mais il s’interpelle aussi par les univers transcendants comme L’insaisissable, de son poème Le lac de la cécité ou l’effroi ressenti à la traversée de La rue des morts » ou encore Le trottoir de l’Apocalypse sans toutefois se départir de sa plume trempée dans une ironie, certes légère, mais non pas sans faire grincer un peu les dents. Aujourd’hui, il compte à son actif plusieurs recueils de poésie : Je ne vois qu’à peine (Editions Dar An-Nahda, Beyrouth, 2007), Le récif de l’effroi, recueil traduit en français par Siham Bouhlal (Editions Marsam, Rabat, 2005), Trottoir de l’apocalypse (Editions Al-Mada, Damas, 2003) et Mannequins (Editions de l’Union des Ecrivains du Maroc, Casablanca, 2000). Cependant, ce nouvelliste qu’il est aussi, a publié un recueil de nouvelles Pommes de l’ombre aux Editions de la faculté des Lettres Ben M’Sik (Casablanca, 2006) et Qui croit aux lettres (Caravan Books, Delmar, New York, 1996).

Collaborant à diverses revues arabes et internationales avec la publication de poèmes, de nouvelles et d’articles, Yassin Adnan a participé à plusieurs manifestations poétiques et festivals à l’étranger, dans le monde arabe et en Europe comme le Festival international de littérature de Berlin, le Salon littéraire arabe de Bruxelles, le Festival Dubaï Al-Thaqafiya à Dubaï, le Swedish-Lebanese-Moroccan Meeting à Beyrouth.
Mais il n’en oublie pas pour autant ses pairs puisque son émission « Macharef » est consacrée aux auteurs du monde arabe et aux personnalités de la culture.
L’écrivain franco-marocain Salim Jay ne dit-il pas dans le Dictionnaire des écrivains marocains que la poésie de Yassin Adnan se distingue par un goût avéré pour la facétie et que c’est un poète qui ne se voit jamais comme un être supérieur aux créatures qu’il évoque avec tendresse ou ironie. Un autre auteur, non des moindres, Abdellatif Laabi lui-même, écrit dans l’anthologie « La poésie marocaine de l’indépendance à nos jours » que Yassin Adnan se distingue par un grain d’ironie, parfois poussée à la dérision ravageuse.

Prochaines publications
- Under the sheltering sky of North Africa (en anglais).
- Jeunes, Internet et démocratie (en arabe).

Extrait de Je te surprends par la fleur

A Imen (1)
Je vais te surprendre par la fleur
Par son feu vert
Par la nouvelle « Evelyne » de James Joyce
Par une danse des ballerines
Par la dernière nouvelle du Bosphore
Par les fleurs
Par le mâle des fleurs
Du balcon
De ce haut balcon
Pourquoi quand dorment les gens
Moi, je veille ?
Pourquoi qu’au moment où les gens perdent la foi,
Moi, je crois….. ?
Pourquoi la joie me torture ?
Pourquoi la pluie douce me torture et mouille mes rêves ?
Avant d’étaler mes miroirs
Sur une vieille fenêtre
Et puis….
Moi, je te désire
Je te désire au téléphone
Dans la guitare
Dans le réveil matinal
Dans la soirée d’hier
Dans le verre et dans l’après-verre
Dans les murmures et bien avant les murmures
Et dans l’entre deux
Mais les chansons qui étaient miennes
Dorment maintenant
Dans la panne de la radio
Hier, j’ai lu ton mail
J’ai eu une pensée à Armanoussa (2)
Et j’ai pensé à Jorji Zaidane (3)
Mais le Caire n’est pas Alep
Et le lait où j’ai nagé
En approchant ton sein
Est devenu fromage dans la mémoire
Pourquoi devrions-nous aimer ainsi, de loin
Tout en pensant aux pigeons voyageurs
Tout en pensant à la brillance
Qui éclaire l’esprit et que le cœur renie
Au vent du nord
Comment t’appelles-tu ?
Imen : m’a-t-elle dit
Mais mon chemin est un mécréant
Et encore plus de pêchés m’attendent
Elle a alors sourit...
(Traduction de Monia Boulila)

إلى إيمان

سأفاجئكِ بالوردةِ

بنارها الخضراء
سأفاجئكِ
بقصة "إيفلين" لجيمس جويس
برقصة الباليرينا
في قصة بوزفور الأخيرة
بالوردِ
بذَكَر الورد
بالشرفةِ
تلكَ العاليهْ

لماذا حينما ينامُ الناسُ
أسهرُ أنا؟
لماذا حينما تكفُر الخلائق
أومِنُ أنا؟

لماذا تعذِّبُني الفرحة
والمطرُ الخفيف يعذبني
ويبلّل أحلامي
قبل أن ينشر مراياي
على شُبَّاك قديم

ثم إنِّي أشتهيكِ
أشتهيكِ في الهاتف
وفي القيثارة
في الصحو باكراً
وفي سهرة الأمس
في الكأس وما بعدَها
في الهمس وما قبلهُ
وفي البين بين
لكنَّ الأغاني التي كانت لي
ترقُد الآن
في عطالة المذياع

أمس
قرأتُ إيميلكِ
ففكرت في أرمانوسة
وترحَّمتُ على جرجي زيدان
لكنَّ القاهرة ليست حلب
والحليب الذي سبحتُ فيه
وأنا أُبادِرُ نهدك
صار جُبنةً في البال
لماذا علينا أن نحبَّ هكذا عن بُعد
ونفكر في الحمام الزاجل
في اللمعةِ
تبرقُ في الذهن فيُنكرها القلب
وفي ريح الشمال

ما اسمكِ؟
قالتْ: إيمان
- ولكنَّ طريقي كافرٌ
والمزيدُ من المعاصي بانتظاري،
فابتسَمَتْ..

فكرتُ في زنوبيا
في جلال الدين الرومي
في صبري مدلّل
وفي "يا مال الشام
  
لكنَّ الشام ليست حلب
والموسيقى التي في الروح
لا تسمعها الآلات
انفُخي في ناي البُعد
لتدنُوَ ريحُكِ
وأشعلي الغيوم في قنديل المساء
أمطري قليلاً
لتخضرَّ صحرائي
وأعيدي غيمة الحليب
إلى دولاب نسيانك
لأتذكر سماءك أكثر
وأحلم ليلاً
بنجوم عينيك

...قلتِ لي: اسمُكِ
..آهٍ
.لكَمْ آمَنْت

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1. Imen : nom désignant croyance et foi.
2. Armanoussa : princesse égyptienne.
3. Jorji Zaidane : écrivain libanais.

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