Léon Gontran Damas |
Le 17e salon du livre de la Plume Noire, qui
s’est tenu du 19 au 20 octobre derniers, a célébré le centenaire de la
naissance du grand poète guyanais, Léon Gontran Damas.
Parmi les personnalités du monde universitaire et littéraire, Gisèle Bourquin, présidente de l’association Femmes au-delà des Mers, a fait un émouvant témoignage sur le poète disparu.
Une dame qui se tourne vers tous les horizons, engrangeant
des expériences africaines par son parcours en Afrique qu’elle a découverte
« à travers le regard d’Aimé Césaire » ainsi qu’elle le dira, des expériences
moyen-orientales car elle travaillera au Moyen-Orient et puis, des expériences
outre-mer, ses racines étant là même si elle vit depuis l’enfance en France.
Tout ce parcours, elle a souhaité le mettre à la portée de femmes et, aussi,
d’hommes, en tant que partage et solidarité, en créant Femmes au-delà des mers
en 2007.
Un objectif qui met des femmes en lumière et, surtout, des
femmes qui montrent le chemin. De sorte que l’on ait envie d’avancer, de dire
que « tout est possible », car appréhender le monde permettrait
que celui-ci « se développe de façon plus harmonieuse » (voir, en fin
du 3ème volet, une présentation succincte de Femmes au-delà des mers).
Gisèle Bourquin a bien voulu partager avec nous son
témoignage sur sa rencontre avec le poète Léon Gontran Damas que nous présentons exceptionnellement dans son intégralité et en trois parties.
Ma rencontre avec Léon Gontran Damas
Alors que j'entreprenais des recherches sur Aimé Césaire,
Hélène Bouvard, femme de lettres m’introduit auprès de Damas. C'était un
dimanche après-midi et je me rends près du Champ de Mars. Marietta et lui
m’accueillent mais très vite elle se met en retrait. Marietta ! Belle
brésilienne, discrète, calme, de qui émanait une étrange sérénité. Iwiyé Kala
Lobé, journaliste de Présence Africaine, a tenu à assortir son hommage posthume
à Damas d’un post-scriptum intitulé « sainte Marietta » : les amis de
Damas sont unanimes pour reconnaître à Marietta une influence tranquille qui a
opéré une salutaire transformation.
Gisèle Bourquin (Reproduction interdite) |
1966. Nous sommes au lendemain des indépendances en
chaîne, la guerre d'Algérie vient de se terminer. Aux Etats-Unis, les
noirs intensifient leur légitime revendication : Angela Davis dérange. Je
renonce à un périple aux Etats-Unis avec un groupe d’étudiants parisiens, ne me
sentant pas de taille à affronter les effets de la ségrégation dans le sud des
Etats-Unis. De même, à l’époque, pour moi un séjour en Afrique du Sud n’est pas
envisageable. En France, la ségrégation n’est certes pas érigée en loi,
toutefois la discrimination est larvée : dans un organisme d'assistance aux
étudiants, le Copar, on peut noter que le propriétaire veut des étudiants de
couleur ... blanche !
En 1966, à Paris, pour la première fois, la chanson se met
au service d’une grande cause humanitaire ! Au Palais des Sports, un concert
animé par Harry Belafonte en l’honneur et en présence de Martin Luther King, au
profit de la lutte contre le racisme fera date… Martin Luther King sera
assassiné deux ans plus tard !
Le monde du théâtre est en pleine effervescence : au
théâtre Lucernaire -à l’époque dans le Quartier latin- les Nègres de
Jean Genêt, tandis qu’à Montparnasse, le Métro Fantôme de Leroy Jones
dénonce les stéréotypes raciaux. Le palais de Chaillot accueille Les ancêtres
redoublent de férocité de l’algérien Kateb Yacine, des pièces de Berthold
Brecht. Quant à la Tragédie du Roi Christophe d’Aimé Césaire,
jouée à Venise en 1964, elle allait prendre le chemin de Dakar pour le Premier
festival des Arts Nègres.
C'est dans cette atmosphère que j’entreprends d’étudier le
théâtre d'Aimé Césaire et ce travail me conduit fort heureusement vers Damas."
(à suivre)
(à suivre)
Léon Gontran Damas
Le poète guyanais est né le 28 mars 1912 et est mort en 1978. Il est enterré en Guyane. Dans les
années quarante, il a fondé avec Aimé Césaire et Léopold Sedar Senghor, le
mouvement de la négritude. Chantre du chant rebelle, il a toujours mis au banc
de l’accusation la politique de l’assimilation.
Sa poésie est d’une telle
écriture qu’elle s’ancre profondément dans la culture et les idées, certes,
pour son époque mais pour notre époque-ci. Sa parole demeure intacte pour qui
se retrouve dans ce qu’elle draine. Même quand elle déchire l’âme, qu’elle
donne le blues de l’homme se battant contre le déracinement, elle est vive,
elle retient, elle fascine.
A lire : Pigments et
Névralgies (Présence Africaine), Black-Label (Gallimard), Retour de Guyane
(José Corti).
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